21
Août
10

Being exotic : l’opéra, nuit de folie dans le train (Zhenghzou)

Localisation géographique : dans le bus, en route vers Shanghaï

Après l’épisode Shaolin, on était un peu refroidi. C’est toujours triste de constater qu’on n’a pas les moyens d’être Zen. En plus, le retour au milieu de la nuit à Zhengzhou dans une camionnette bondée, la recherche d’un taxi acceptant de nous mener à l’université et la traversée à pied dudit campus sans trop savoir où nous allions avaient quelques peu étanché notre soif de sérénité.

C’est à ce moment de l’histoire qu’apparait Luna. Elle était parmi les contacts CouchSurfing potentiels mais son emploi du temps ne lui permettait pas de nous héberger. On avait quand même convenu d’un pot ensemble avec une option sur une visite de la ville. Luna rentrait d’un an d’Erasmus en Italie (enfin de l’équivalent d’Erasmus, Marco Polo ?), elle passait les 10 jours qui la séparaient du retour à la fac dans sa ville natale où elle nous avoua ne plus connaître grand monde : nous étions fait pour nous entendre.

zhengzhou2-800

Choses vues à Zhengzhou…

Elle nous a montré sa ville, le musée archéologique de la province du Henan, ses rues, elle nous a emmené dans un magasin de thé où on a trouvé un Pu’Er à damner un moine, au marché, au parc… En sortant du parc justement nous tombons sur ce drôle de Monsieur qui, nous entendant parler, s’approche et pose à Branka des questions des plus étonnantes sur l’utilisation des « question tag » en anglais.

question tag-800

This guy asked us questions about « question tags », didn’t he ?

C’est ainsi que nous avons passé deux jours de plaisirs et de découvertes qui ont commencé par une visite du nouveau quartier de la ville.

pano-800

Je sais que mon panoramique est foireux mais il a été fait dans le bus entre Lianyungang et Shanghai à coté d’un type pour qui la taille de mon tour de ventre devait faire parti de ses fantasmes les plus fous. Pourquoi est ce que le seul gros du bus a le siège à coté du mien ?

Je ne sais pas si les chinois vont inventer ou ont déjà inventé la ville du XXIème siècle mais il est impossible en visitant ce pays de ne pas voir dans les milliers de chantiers qui se dressent partout un hymne à l’avenir. Dans les villes tout est neuf : ponts, routes, immeubles semblent sortir de terre avec une déconcertante facilité.

DSCF2724-800

Certains de ces grands ensembles sont des réussites mais tous n’échappent pas à une certaine déshumanisation… (A moins que ce ne soit mon esprit de vieil européen qui parle). La construction de nouveaux quartiers s’effectuant bien souvent à la place des anciens, certains chinois sont conscients qu’ils perdent ainsi une partie de leur histoire mais la marche à la modernité se fera quoi qu’il arrive et rien ne semble pouvoir l’arrêter.

DSCF2731-800..

Vue sur les nouveaux quartiers de Zhengzhou

Nos pérégrinations pédestres nous mènent par hasard près d’un gigantesque bâtiment en forme de bulle. Un type en uniforme nous observe d’un air amusé. On (enfin : Luna) lui demande si on peut rentrer, il dépine du chef (NDLA : « dépiner » inverse d’opiner, néologisme inventé par l’auteur). C’est interdit ? « pas du tout mais c’est à cause de l’opéra » explique t il. Les yeux de Branka se mettent à briller car oui c’est bien d’une troupe d’opéra de Beijing qu’il s’agit.

La salle d’opéra est immense et le public occupe à peine la moitié des sièges. Une armée d’ouvreuses circule dans les travées et semble faire mollement la chasse aux quelques types qui exhibent des appareils photos. Une voix enregistrée rappelle avec un accent superbement américain que « in order to create an agreeable and elegant environment suitable for the performance please refrain from making any loud noise ». On en oublierait presque qu’on est en short et sandales…

Les lumières s’éteignent, la première des 3 parties commence. C’est superbe. Etonnant. Magique. Ca tient à la fois de l’opéra version européenne et du show acrobatique : certains combats avec échange de coups et de lances sont somptueux. J’ai du mal à résister. Il est si facile de basculer dans le crime. Sainte Albanel protégez moi ! Olivennes aide ton disciple ! Ce que je vais faire est mal. Mais la tentation est trop grande : Je sors mon appareil et prends discrètement une photo, puis deux, trois, je ne peux plus m’arrêter (même si la qualité est dégueulasse). Je glisse avec volupté du coté obscure de la force : j’active le mode « caméra » de mon appareil et me vautre dans le péché.

opera-800

Deux photos pillées à l’opéra de Zhengzhou. Le pillage numérique : dernière étape avant le snuff movie…

Heureusement : les dames qui patrouillent dans les coursives m’ont empéché d’aller trop loin. Sous réserve que l’upload se passe bien voici quatre courts extraits de l’opéra :

  • dans cet extrait le chef des gardes (de je ne sais pas qui mais bon) refuse de combattre l’héroine sous le fallacieux prétexte qu’elle est une femme (elle a quand même foutu en l’air la moitié de son régiment mais dans l’histoire il ne veut pas la toucher parce que c’est une fille. Tocard !)
  • Cet extrait et celui-ci sont des scènes typiques de combats qui sont scénarisés avec forces accrobaties (et encore j’ai manqué la scène d’introduction qui était vraiment magnifique).
  • Enfin cet extrait là , voit le roi singe hésiter (un peu) avant d’aller dérober les pêches (symbole de vie éternelle) que l’on voit à l’arrière plan.

Le lendemain est notre dernier jour à Zhengzhou. Le soir nous partons pour Lianyungang, station balnéaire sur la mer de Chine où nous avons réservé un hôtel pour 2 nuits. L’obtention des billets de train n’a pas été facile et sans l’aide de notre hôte, nous n’aurions pas pu y arriver. S’il y a un conseil pratique de ce voyage à retenir c’est bien celui-ci : sécurisez au maximum l’achat de vos billets de train en vous y prenant longtemps à l’avance (longtemps veut dire plus d’une semaine). Pour le reste, comme on va le voir, c’est assez rustique…

DSCF2754-800

La gare de Zhengzhou : lieu du début de l’action.

Avant le départ nous avons tenu à dévaliser un supermarché local afin de pouvoir tenir les 12 heures de train (de nuit) qui nous attendent. La visite de cet établissement respectable nous réserve quelques surprises que mon naturel humaniste ne peut que partager avec l’aimable assemblée des lecteurs. Voici donc ce que nous avons trouvé. Tout d’abord ce shampooing dont le nom laissera rêveur tous les français :

lecon-800

Tous les matins pour avoir une toison capillaire soyeuse, je me frotte le crane avec Lecon.

Dans la section « for men only », les dames découvriront avec un ravissement bien légitime ce kit du dragueur compulsif qui ne saurait les laisser indifférentes :

kit drague-800

Rien que du classieux : du sent-bon « baisen » (histoire de lever toute ambiguïté), deux slips propres à déchaîner les pulsions les plus animales de la gente féminine et des préservatifs décorés avec une dame qui à l’air d’aimer le cuir, la domination et la poésie (aussi un peu)

Il y a un truc curieux avec les trains chinois c’est qu’ils ont calqué l’organisation du voyage en train sur celle du voyage en avion. On parle ainsi d’embarquement (« boarding ») et les voyageurs sont priés d’attendre dans des « waiting room » l’arrivée du train en gare.

DSCF2766-800

Notre waiting room privée à nous les voyageurs du train de nuit pour Lianyungang

De même la gare est clairement séparée entre la zone accessible au commun des mortels et celle où seuls les individus munis de billets sont acceptés. Pour nous accompagner Luna a du acheter un « billet de quai » (truc qui n’existe plus en France depuis au moins 20 ans mais qui trouve ici pleinement son sens).

DSCF2769-800

Luna notre sauveuse (billet de quai non visible sur la photo).

Chose agaçante car peu fréquente notre train a du retard. En me balladant dans la salle d’attente je fais quelques photos dont ces deux clichés de cette petite fille qui ne cesse de m’observer. Je suis si exotique !

petite fille-800

Being exotic…

Le train est enfin arrivé. Luna nous a accompagné jusque dans le wagon pour s’assurer que tout était ok et on est parti. Comme tous les trains que nous avons emprunté en Chine, celui-ci était bondé. Il y avait pourtant autant de personnes que de places, ni plus ni moins mais la vérité est qu’on avait du mal à bouger.

ds le train-800

Le train : une aventure communautaire intense.

Je jette un oeil sur l’habitacle qui m’est réservé pour la nuit. Sur le billet seule la rangée de couchettes est réservée, en théorie il est donc nécessaire de discuter le coup avec les autres voyageurs pour trancher la sempiternelle question « qui va où ? ». Dans les faits c’est le premier arrivé qui gagne ce qui me permet de m’installer sur la couchette du bas où je commence la rédaction du billet sur notre visite à Nanjing.

DSCF2771-800

Un environnement propre à encourager les contacts humains.

Avant de m’asseoir, je jette toutefois un oeil sur le drap. Bon. Comment dire. Ce drap n’est pas un jeune. C’est un drap qui a vécu. Il pourrait en raconter, il a peut être fait la révolution culturelle ! A vue d’oeil (je veux pas y mettre mon nez) il a du connaître pas mal de gens. Certains ont d’ailleurs laissé des poils en souvenirs. Il a des choses à dire le bougre, il est constellé de tâches qui sont autant d’étoiles propres à inviter à la réverie. Par exemple là, on distingue la grande Ourse. Bon pour faire un truc pareil, l’ourse en question ne devait pas être seule. A mon avis elle avait amené ses copines voir toute la tribu et je sais pas ce qu’elles ont fait mais je te prie de croire qu’elles étaient joyeuses ! D’ailleurs c’est bien simple : elles en ont mis partout ! Un moment je crois voir un truc bouger mais non, c’est juste un poil qui frissonne…

Pendant ce temps là je suis observé. C’est la plus petite qui s’est décidée la première, elle a ri et a déposé devant moi un genre de brioche (‘french bread » en plus ! ») puis elle s’est enfuie en riant encore plus fort. Elle a ensuite envoyé son frère qui s’est assis à coté de moi, a laché un « hello » et s’est marré avant de disparaitre à son tour. Enfin est arrivée la plus grande trainée par la petite. Elle a laché un « I not speak english » puis a éclaté de rire. Qui a dit que la barrière du language était un problème ? Dans « Adieu Gary Cooper », l’immense Romain Gary avait déjà esquissé une apologie de la barrière du language. J’aimerai bien en parler avec ces braves gens mais ça semble mal engagé. En attendant mon fan club a amené des potes. On commente la rédaction de mon billet sur Nanjing. Ils ont l’air d’apprécier, c’est agréable. Entre temps on m’a aussi apporté force bouffe et boissons que j’ai fini par refuser n’ayant rien à offrir en échange.

DSCF2775-800

L’amicale des lecteurs du billet sur Nanjing.

On a aussi essayé d’échanger nos noms puis on a renoncé. Ni eux ni moi n’arrivions à les prononcer sans les écorcher. A un moment ils ont tous détalé sans raison pour réapparaitre aussi sec comme par magie. La grande a ouvert sa main sur un lecteur MP3 (made in China). Bon. C’est de l’USB2, cette bonne vieille machine devrait comprendre. Le lecteur est plein de mp3. Elle veut qu’on en écoute un mais le garçon n’est pas d’accord sur son choix. Finalement la petite tranche et on reste comme des cons à écouter le fichier en souriant bétement. Sans rien pouvoir se dire. Et c’est bon…


1 Réponse to “Being exotic : l’opéra, nuit de folie dans le train (Zhenghzou)”



Laisser un commentaire


août 2010
L M M J V S D
 1
2345678
9101112131415
16171819202122
23242526272829
3031  

Oui j\'ai bien réfléchi et je veux suivre les péripéties familiales de l\'auteur du blog et de sa famille. Je saisis mon adresse mail pour recevoir une notification à chaque publication d\'article. Mon poil sera soyeux et délicat au toucher, je réussirai au permis de conduire, chance aux examens, retour de l\'être aimé(e)...

Rejoignez les 8 autres abonnés